LE PLAN CASCADE | 10/12/2008 | le dossier
Le plan Cascade est prévu comme une bonne grosse conspiration, classique, avec la CIA dans le premier rôle.

Le Seattle sourcebook faisait mention d'un coup d'état épaulé par des conseillers militaires de Boeing contre le gouvernement communiste de Malaisie en 2049. C'est typiquement le genre de détail dont je suis le seul à ma rappeler. Seattle est le premier supplément de Shadowrun, et les auteurs commençaient tout juste à explorer l'univers qu'ils étaient en train de créer. Dans ce cas-ci, il était assez manifeste que celui qui avait écrit la phrase en question avait simplement remplacé "CIA" par "Boeing". Voilà pour l'idée de départ.

Dans Shadowrun, le siège de Boeing était toujours à Seattle. Pendant ce temps, dans le monde réelle, Boeing l'a déplacé à Chicago il y a quelques années. Comme toujours quand l'univers réel bifurque dans une direction différente de Shadowrun, le première option est de considérer que cet événement n'a jamais eu lieu dans Shadowrun. La deuxième possibilité était que Boeing avait déplacé une seconde fois son siège par la suite pour revenir à Seattle. La destruction de la majeure partie du quartier d'affaire de Chicago dans un attentat terroriste me paraissait une justification plausible. En l'occurence, l'attentat de la Sears Tower était décrit dans le Neo-anarchist Guide to North America (NAGNA). J'avais pris soin à l'époque de la rédaction de vérifier la distance qui séparait le nouveau siège de Boeing de la Sears Tower. Je ne l'ai pas noté, mais tant que je m'en souvienne, il était suffisament proche pour que les conséquences de l'attentat ne fasse aucun doute, compte tenu de la description qui en était faite. A l'époque où ce supplément avait été écrit, en 1990 ou 1991, le rôle de l'extrême-droite raciste dans les attentats était en phase avec l'imaginaire et l'actualité américaine. La théorie de la conspiration qui voyait l'oeuvre des services secrets américains dans les attentats du 11 septembre 2001, des années plus tard, pouvait pour autant s'adapter aussi bien, sinon mieux, à l'attentat de 2039.

L'effort d'écriture a surtout porté sur le contexte politique des USA/UCAS au début des années 2030, tel qu'il est décrit dans Shadowrun. La sécession des états du sud, la montée du Technocrat Party soutenu par les milieux d'affaires et la fin du bipartisme, l'expansion de Lone Star Security Services au travers d'acquisitions et de la mission fédérale de lutte antidrogue, sont autant d'éléments que j'ai repris du background officiel de Shadowrun (le trafic de puces BTL vers l'Inde vient aussi du NAGNA). Je n'ai ajouté que deux éléments pour que la sauce prenne : la destruction du siège de Boeing à Chicago, et le réseau Monument, dont l'idée est une extension de l'opération Tanto.

Evidement, si on a un peu de bon sens, et en admettant tout de même que la CIA soit prête à éliminer quelques dizaines de cadres supérieurs d'une entreprise américaine, on ne les imagine pas fomentant un attentant qui viserait une tour voisine dans le but de détruire tout un quartier. Il serait plus plausible que l'agence se soit contenté de tirer profit de la situation. Encore que, la chapitre One nation under God de Threats 2 autorise à imaginer une certaine proximité entre l'extrême-droite nord-américaine et une équipe de la CIA crée pour faire face à l'effondrement des USA. Un scénario légèrement plus plausible serait que la CIA a aidé ou au moins laissé faire un attentat dont elle croyait qu'il viserait uniquement le siège de Boeing, conformément à ses plans, et qu'elle soit dépassé par l'ampleur de l'attentat réalisé.

Si l'attention se focalise sur Boeing à cause de l'énormité de ce qui est suggéré, les deux messages font tout de même état plus ou moins explicitement d'une manipulation de la Lone Star par la CIA. La reprise de la Drug Enforcement Administration (DEA) et par la force des choses, d'une partie de ces agents, permet aux services américains de faire entrer de manière massive des agents loyaux dans la corporation. Historiquement, la DEA a eu la réputation d'être une émanation de la CIA : avant sa création en 1973, la lutte contre les narcotiques de l'administration Nixon était dirigé à la Maison Blanche, principalement par d'anciens agents de la CIA qui connaissaient bien l'Amérique latine, et dont certains se sont conpromis dans l'affaire du Watergate et peut-être même l'assassinat de John Kennedy.

Je n'ai jamais trouvé l'occasion d'utiliser cette intrigue dans un scénario. La multiplication des secrets et des conspirations devient rapidement ingérable et incompréhensible. Mais dans l'optique de son utilisation, l'une des idées maîtresse serait effectivement de lancer les PJ d'abord sur la piste d'agents de la CIA infiltrés au sein de la Lone Star à la faveur de manipulations politiques et financières, et qu'en découvrant le fin mot de cette histoire, ils découvrent par la même l'existence d'un autre réseau au sein de Boeing, les amenant à obtenir des preuves de l'implication de l'agence dans l'attentat de Chicago.