LA GUERRE DE COLOMBIE | 25/08/2013 | le dossier | PDF

La guerre de Colombie entre l'Aztlan et l'Amazonie devait être l'une des intrigues majeures de la 4e édition. Elle faisait suite aux événements de Ghost Cartels, commençait dans un supplément au titre explicite, War!, et s'est achevé dans Storm Front, qui a marqué le fin de la 4e édition. Entre deux, elle a servi de cadres à trois scénarios, Colombian Subterfuge, et Photo Ops et Operation Blindside en format court dans le recueil Jet Set (plus quelques autres où ca n'était guère plus qu'un décor pour une histoire qui aurait pu aussi bien se dérouler à Seattle ou à Denver).

L'idée d'une guerre en valait une autre, mais l'exécution fut catastrophique. War! avait été assemblé à la va-vite, en partie par des auteurs sans expérience, sans répartition claire des sujets à traiter ni dans quel ordre. Le motif de la guerre était au mieux flou, au pire idiot (les amazoniens reprochant aux aztlans d'avoir répandu des arbres hypnotiseurs carnivores autour de la ville). Quelques noms de lieux étaient dispersés à travers le livre, sans jamais expliquer où se trouvait la ligne de front (en l'absence d'illustrateur, il n'y avait aucune carte). War! était situé trois ou quatre mois après le début de la guerre, et ne fut suivi de pratiquement aucune mise à jour. La description de la guerre se limitait à la mention d'affrontements entre troupes aztlanes et amazoniennes dans la jungle autour de Bogotà (la ville se trouvant en fait à 2640 mètres au dessus du niveau de la mer, le terme de jungle techniquement est inapproprié, il s'agit d'un forêt tropicale humide d'altitude). Les suppléments qui vinrent après ne traitaient que du grand dragon Sirrurg, qui avait certes attaqué la ville de Cali au début de la guerre, mais était ensuite parti toujours plus au nord, attaquer des cibles au Nicaragua, à Porto Rico et plus au nord, à la frontière entre l'Aztlan, le Pueblo et le Texas. L'on savait le nom de la moindre bourgade texane attaqué par Sirrurg, et l'on avait aucun nom de bataille à se mettre sous la dent. Il est vrai que la forme de conflit moderne (du type du Vietnam, de l'Afghanistan ou de l'Irak) basée sur la guérilla et la contre-guérilla, se prêtent moins facilement à la narration que les guerres plus anciennes. D'autant que l'on sent clairement l'inspiration des dernières années dans la vision que l'on peut avoir d'une guerre moderne.
Storm Front prenait enfin quelques pages pour raconter les différentes étapes de cette guerre, au moment d'y mettre un terme. Mais le niveau de détails se limitait à dire quand la ligne de front avait avancé de 50 kilomètres, et quand elle avait reculé, sans jamais citer de lieux ou de bataille. C'était surtout le pretexte pour les préparatifs d'une bataille finale entre les aztlans et Sirrurg, à Acapulco, encore une fois très loin de la ligne de front. A peine cette bataille finie (sans oser aller jusqu'à laisser des mortels tuer un grand dragon, par principe), la guerre devait se finir dans un fouillis incohérent, où les aztlans et l'ONU déployaient subitement des troupes cachées jusque-là (mention spéciale pour le groupe aéronaval et le groupe d'assaut amphibie qui passent du golfe d'Aztlan à l'océan pacifique sans que personne ne s'en rende compte). Pour que ce soit encore plus agaçant, l'auteur s'apesentit lourdement sur le Free Marine Corps, décrit dans le supplément 10 Mercs et qui incarne désormais dans Shadowrun la perfection militaire américaine injustement oubliée jusque là, mais sans assumer la basse réalité du métier de mercenaire.

Malgré tout, il y a eu quelques passages pour m'inspirer et j'avais envie de jouer avec cette histoire. Ca nécessitait pour moi de mettre en cohérence cet ensemble, de créer un univers, une dynamique, des personnages, des lieux. Comme d'habitude, j'ai essayé de le faire en partant de ce qui existait déjà, et en me contraignant à y rester fidèle (plus souvent à la lettre qu'à l'esprit d'ailleurs). Ca m'évite l'angoisse de la page blanche.
J'avais déjà joué une campagne tournant autour du trafic de drogues du cartel d'Olaya, et j'avais commencé à montrer à mes joueurs les relations entre les différents acteurs de la région, en leur faisant croiser la route d'agents aztlans, de membres des cartels, de guérilleros amazoniens... Il fallait encore que j'explique pourquoi le status quo avait été rompu. J'avais aussi besoin, pour décider des batailles qui seraient menées, de savoir où chacun des deux belligérants voulaient aller. Mettant de coté cette histoire d'arbres carnivores, j'ai envisagé le point de vue aztlan sous deux angles.

Le premier angle est celui de la stabilité de la région. La zone d'action des cartels se situe à cheval entre l'état aztlan de Colombie, l'Amazonie, le Venezuela, le Pérou... L'Aztlan est contraint de maintenir une présence sécuritaire, au moins policière, plus probablement militaire, dans cette région. J'ai fait un parallèle avec la guerre d'Irak. Les Etats-Unis avaient une volonté de maintenir la stabilité du Moyen-orient. Les iraniens, parce qu'ils craignaient d'être la cible suivante des américains, ont tout fait pour entretenir le chaos en Irak. De cette façon, les forces américaines continuaient de s'y battre et ne pouvaient pas envisager d'autres actions. Les amazoniens pouvaient tout à fait suivre une stratégie similaire dans la région de Bogotà. En Irak, les américains optèrent pour la stratégie du Surge : au lieu d'essayer de neutraliser les menaces petit à petit, avec les moyens disponibles et dans la durée, il fallait au contraire augmenter les effectifs autant que possible en concentrant l'effort sur une période de quelques mois, pour pouvoir attaquer de façon massive et sans laisser à l'ennemi de répit. Le résultat fut jugé convainquant (et le général qui en était à l'origine fut promu).
Ma première idée était donc une guerre décidée par les aztlans pour frapper fort et éliminer une fois pour toute la capacité de nuisance des cartels, et des nationalistes colombiens qui recevaient le soutien des agents amazoniens. Il fallait simplement contenir les forces armées amazoniens le temps de faire le ménage. On se plaçait là dans une situation de guerre contre-insurrectionelle.

Je n'étais pas pleinement satisfait par cette idée, car elle impliquait un conflit très statique, du coup assez fidèle aux suppléments, mais avec peu de reliefs et de rebondissements. Le parallèle avec l'Irak allait continuer. Le Venezuela est en effet l'un des principaux pays producteurs de pétrole. Ses gisements se trouvent principalement à l'ouest, et une partie sont de l'autre coté de la frontière avec la Colombie. Aztechnology est un producteur de pétrole, à travers sa filiale, la Pemex. La nation écologique d'Amazonie devrait assez logiquement être opposée à l'utilisation des carburants fossiles. Si la frontière se déplaçait dans une direction ou une autre, il y avait des conséquences. Même si ca manquait d'originalité par rapport aux conflits qu'on a connu au 20e siècle, ca avait un sens.
En m'intéressant à la géographie de la région, j'ai également découvert que la jungle amazonienne est loin de tout recouvrir. Il existe entre la Colombie, le Brésil et le Venezuela une région de plaines assez similaire à la savanne africaine, qu'on appelle simplement Los Llanos (Les Plaines en espagnol). Bogotà se trouve à la pointe sud-ouest de cette région : depuis la capitale, il faut traverser la cordillère des Andes orientales sur seulement cinquante ou cent kilomètres avant d'y arriver. Toute l'imagerie du conflit reposait sur des combats dans la jungle (enfin, je veux dire, la forêt humide d'altitude) et l'avantage qu'elle procurait à la guérilla amazonienne. C'est là que j'ai commencé à trouver la dynamique de la guerre. En me documentant sur la région, je découvrais Villavicencio, Quetame, le réservoir de Chivor et la barrage de La Esmeralda, le lac de Tota et la légende du monstre Busiraco.

War! donnait un rôle important aux tribus colombiennes dans le conflit. A la lecture, j'y trouvait un parallèle que je pense volontaire avec les clans irakiens. Les tribus n'ont plus vraiment ce rôle dans la société colombienne, mais à Shadowrun, pourquoi pas. J'ai rapidement identifié les Muisca comme étant les plus susceptibles de jouer un rôle, étant les plus nombreux dans la région de Bogotà. J'ai aussi découvert la tribu Nasa, dans la région de Cali. Leur milice d'auto-défense existe depuis plusieurs années pour empêcher l'armée et des FARC d'entrer sur leur territoire, conséquence de la guerre civile en Colombie, et ils refusent réellement d'utiliser d'autres armes que le baton traditionnel. A Shadowrun, j'ai préferré qu'ils gardent des armes, plutôt que de les laisser se faire massacrer par le premier groupe de PJ venu.

La troisième tribu qui m'a particulièrement intéressée dans la région est celle des U'wa. On les trouve entre autre dans le département d'Arauca. La documentation que j'ai trouvé ne m'a permis de déterminer de façon certaine si l'Arauca était d'abord le nom de la capitale du département, de la rivière ou de la tribu elle-même, les U'wa Arauca (je suis porté à croire que le mot Arauca pourrait venir d'une langue des caraïbes, et qu'elle serait passer dans le "jargon" de certains conquistadors pour désigner certains indiens, mais j'ai tellement peu de certitude que ca pourrait aussi bien d'être de l'elfique). Certes, les principaux gisements pétroliers de Colombie, dont je parlais plus haut, se trouvent justement dans l'Arauca (ce qui a valu à la tribu, opposée au forage, une exposition médiatique). Mais c'est le nom lui-même qui m'a interpelé. A l'époque de l'Earthdawn, qui est le passé de Shadowrun, l'empire de Thera (l'Atlantide si vous préferrez) possède un comptoir de l'autre coté de l'océan. Ils n'utilisent pas le nom d'Amérique, mais celui d'Araucanie. Pendant longtemps, j'ai cru que la seule correspondance possible avec une région du Chili qui porte le même nom, l'Araucanía. Ca n'était pas l'endroit le plus logique pour des colons venus de Méditerranée, même s'ils ont des navires volants. Découvrir qu'une région de Colombie porte ce nom, et est pratiquement au milieu d'un conflit entre l'Aztlan, nation qui utilise la magie de sang, et l'Amazonie, dirigée par des dragons, ouvrait des perspectives disons intéressantes. D'autant qu'une partie méconnue de l'histoire à l'époque de l'Earthdawn raconte que certains dragons d'Araucanie utilisaient la magie de sang pour régénérer la jungle, tandis que d'autres dragons l'ont enseigné aux mortels pour qu'ils combattent la menace des Horreurs. Ces dragons n'étaient pas d'accord pour savoir si la magie du sang risquait de corrompre la terre ou les mortels, et il y eu une guerre. D'une certaine manière, la guerre de Colombie en était la continuation. Mais c'est un sujet que je ne fais qu'évoquer, vu qu'il est difficile de parler de secrets millénaires comme on parle de corporations et de mercenaires.


Comme je joue régulièrement avec un groupe dont les personnages sont basés en France, j'ai fait en sorte de créer des liens entre la France et la Colombie. C'était aussi avec ce groupe que j'ai joué une campagne qui se concluait par le rachat d'Esprit Industries par Dassault, une filiale d'Aztechnology. Cet événement a été intégré de force dans le canon après une erreur dans Corporate Guide. Outre le lien avec la France, je trouvais logique que le rachat d'une société d'armement par le groupe Aztechnology ait un impact dans une guerre lancée par l'Aztlan quelques mois plus tard. J'ai envisagé de rajouter quelques français dans l'histoire, mais comme il n'en apparaissait aucun dans le canon auquel je voulais rester un tant soit peu fidèle, je ne l'ai pas fait. La possibilité reste tout de même là. Il y a eu une exception, la famille de Bourbon. Le vrai héritier de la famille de Bourbon, Louis de Bourbon, prétendant au trône de France, est mariée à une vénézuelienne, Maria-Margarita Vargas Santaella, qui devrait hériter de la banque de son père, la Banco Occidental de Descuento. C'est un élément que j'ai réutilisé à Shadowrun, faisant de la Banco Occidental de Caracas la holding familiale, et créant au passage des liens entre Caracas et Paris qui m'ont servi dans un scénario.

Antonio Cordoba a été un protagoniste de plusieurs scénarios que j'ai joué. Le personnage apparaît à l'origine dans Ghost Cartels, où il est l'émissaire du cartel d'Olaya en Afrique et au Proche-orient, et dans Vice, où il assure l'intérim à la tête du cartel. Un de mes joueurs a notamment pu assister à l'assassinat de Rita Tuero et à l'arrivée de Cordoba sur les lieux.
Monseigneur Augusto Cejas est un autre personnage de ma campagne, lui inventé pour l'occasion. A l'origine, il était l'archevêque de Caracas. Mais le poste était occupé par le cardinal Eduardo Ortega-Nunez dans Artifacts Unbound en juillet 2073. J'ai donc rétrogradé Cejas en tant qu'évêque de La Guaira. Mais comme le cardinal Ortega-Nunez est tué dans le scénario où il apparaît (un événement que je ne mentionne pas), Cejas pourrait bien récupérer la place finalement.

Je veille d'ailleurs normalement à faire converger toute ma production. Pour autant, je n'ai pas du tout fait référence à l'envoi d'une force internationale de maintien de la paix à Caracas au début de l'année 2073, qui était mentionné dans mon dossier sur le 1er régiment étranger de cavalerie. L'idée (et le dossier sur le 1er REC) venait à l'origine d'un projet indépendant d'écrire une version alternative de War!, qui aurait revisité le conflit colombien d'une façon assez similaire à ce que j'ai fait (mais en prenant je pense un peu plus de liberté avec le canon) et fournit plus d'informations sur les techniques militaires au 21e siècle. Comme mon objectif avec ce dossier était de tourner autout du canon sans jamais trop s'en éloigner, je n'ai pas voulu ajouter toute cette partie.

J'ai imaginé les guerriers apaches des forces spéciales pendant que je travaillais sur le dossier sur les nations des américains d'origine, où je raconte aussi l'histoire de cette tribu à Shadowrun.


Parmi les problèmes de cohérence du canon que j'ai eu à traiter, les cartes existantes montraient que la ville de Cali étaient du coté aztlan de la frontière dans le supplément Aztlan, et du coté amazonien dans Sixth World Almanac. Et la description de la bataille de Cali dans War! disait clairement que Sirrurg attaquait la ville où se trouvaient des forces aztlanes. J'ai donc mis en scène une prise de la ville qui se déroule dans le calme, et utilisé les pacifistes Nasas pour justifier que la région ne constitue pas une deuxième ligne de front.

Le conflit colombien est en effet presque uniquement décrit comme se déroulant autour de Bogota. Il y a pourtant à quelques endroits des allusions d'autres batailles, situés plus ou moins loin. C'est le cas de Yopal, Georgetown et Maracaïbo, mentionnées dans War! comme ayant été le théâtre de l'utilisation de pouvoir de compulsion d'un esprit de l'ombre. J'ai fait ce que j'ai pu pour intégrer une bataille dans un endroit aussi lontain que Georgetown qui n'entrainerait pas non plus l'ouverture d'un deuxième front. Du coup, ces trois batailles s'avèrent être les seules batailles que j'ai placé en dehors de la zone de combat principale.

Un autre problème auquel j'ai été confronté est le camp dans lequel les unités de mercenaires se battent, en particulier MET2000. War! fait un inventaire pour chacune de tous les employeurs qu'elles peuvent avoir, sans doute pour insister sur le duplicité des mercenaires. MET2000 est ainsi présente dans Bogota, mais n'accepte que des contrats contre les aztlans... qui contrôlent la ville. Ces derniers n'ont aucune raison de laisser des mercenaires qui travaillent contre eux rester en ville entre deux missions et se faire livrer du matériel (surtout que les véhicules blindés qu'ils sont sensés utiliser ont une empreinte logistique plutôt significative). En plus, Ares Macrotechnology détient 17% de MET2000, mais soutient les aztlans. J'ai fini par plus ou moins laisser tomber ; j'ai juste minimisé l'intensité de leur engagement au moins en 2072.
Concernant l'association d'Ares avec Aztechnology, j'ai un peu tordu le bras aux idées reçues. Sur le papier, il n'a jamais été dit que les deux corporations avaient une hostilité particulière l'une envers l'autre. Mais ca correspond à la vision des choses de la majorité des gens, qui tendent à classer le premier du coté des gentils et des américains, le second du coté des méchants. Je l'ai moi-même fait, ce qui va m'obliger à quelques contorsions dans ma campagne pour l'expliquer à mes joueurs.
D'une manière générale, l'idée que des sociétés privées collaborent avec la nation amazonienne avait l'air étrange. L'Amazonie a toujours été décrite, ou plus exactement, n'a toujours pas été décrite comme une nation en marge du système international, respectant des principes écologistes dans un monde dominé par des multinationales. C'est aussi dans cet esprit que j'ai dressé un parallèle avec l'Iran ou la Libye, en affublant Hualpa d'un titre de gardien de la révolution et imaginant les camps d'entrainement terroriste dans la jungle. En réalité, la population urbaine d'Amazonie représente un marché tellement important qu'il serait sans doute impensable qu'ils se tiennent complètement à l'écart de l'économie mondiale. Il est bien précisé qu'Aztechnology n'a pas le droit d'opérer dans le pays, mais les autres corporations sont sans doute prêt à se conformer aux demandes du gouvernement pour pouvoir faire des affaires dans le pays. J'avais pensé suggérer que la présence du MET2000 du coté amazonien trouvait sa source dans les liens entre MET2000 et l'état allemand, qui détient un tiers du capital, des politiciens écologistes allemands (plus influents que ne peuvent l'être leurs homologues français), et le gouvernement amazonien.
Storm Front parle aussi à plusieurs reprises de l'impossibilité pour les forces d'Aztechnology de se battre contre les amazoniens, jusqu'à la bataille finale où les amazoniens attaquent des installations de la corporation. Soit disant que ca mettrait à mal la séparation qui existe officiellement entre l'état aztlan et la corporation (et à laquelle personne ne croit réellement). Mais les deux camps payent des sociétés militaires privées pour participer au combat. Pour quelle raison pourrait-on reprocher à l'Aztlan de faire appel à ses propres citoyens, employés d'une société privée, mais pas à des mercenaires étrangers ?!

Mon incrédulité a du atteindre son point le plus haut avec l'attaque de Sirrurg à Porto Rico (désigné par son nom indigène de Borinquen dans les suppléments, sans se préoccuper de savoir si le lecteur le sait). Une fois n'est pas coutume, l'auteur responsable a décidé de faire référence presque exacte à un ancien supplément.
Dans Cyberpirates, on apprenait que Natural Vat Technologies, filiale du groupe Aztechnology, basée à Porto Rico, produisait les 4/5e de la nourriture d'Aztlan grâce à des myco-protéines produites en cuve. Dans Dirty Tricks, Sirrurg détruisait la seule et unique usine de Natural Vat, qui produisait les 4/5e de la nouriture vendue par Aztechnology dans le monde, provoquant une famine qui touche gravement l'Amérique du nord. Vous apprécierez la petite différence, qui passe de la consommation d'un pays à la production d'une corporation.
Féru de système métrique, j'avais calculé que pour simplement égaler la production actuelle de Mondelez International (Kraft Foods), Porto Rico devrait exporter entre 8'000 et 10'000 tonnes par jour. Ca équivalait à 20 cargos au format "Chinamax" partant chaque jour, soit douze fois le trafic du port de Shanghai, ou l'équivalent de l'ensemble du trafic portuaire chinois actuel. Pour fournir les 4/5e de la nourriture au 134 millions d'habitants d'Aztlan, il fallait selon un estimation approximative entre 100 à 200'000 tonnes par jour, soit 200 à 400 cargos "Chinamax". Pour une fois, l'ancien supplément ne valait pas mieux que le nouveau.
J'ai "résolu" ce problème en parlant d'une usine de production de certains ingrédients, comme des conservateurs ou des agents de texture, dont le manque serait succeptible de paralyser la production ailleurs en Amérique du nord (j'imagine que c'est même assez crédible de nos jours).

Les circonstances dans lesquelles se terminent la guerre ne me satisfont ni dans la version originale, ni dans la mienne, parce que je ne pouvais pas beaucoup m'éloigner des premières. L'opération Marauder est présentée comme nécessitant des ressources importantes, et pourtant les aztlans prévoient de lancer l'opération Huntress à Bogota immédiatement après, dans les deux heures qui suivent. C'est totalement incohérent sur un plan militaire. Même en admettant que l'effet de surprise soit un facteur décisif de victoire (ca ne l'est jamais, et d'ailleurs les combats se poursuivent pendant plus de trois semaines), les amazoniens n'auraient même pas le temps de baisser leur garde après avoir appris que Sirrurg avait pu être abattu.
La seule chose vraiment intéressante dans la phase finale, c'est la date choisie : l'opération Marauder a lieu alors que la nation amazonienne devrait être en train de célébrer le quarantième anniversaire de leur révolution, du 28 août au 2 novembre 2034 (dans un premier temps, je m'étais trompé sur la date, pensant que l'opération Marauder avait même lieu le lendemain de l'anniversaire de la chute du gouvernement brésilien). Mais comme cette coïncidence n'est mentionnée nulle part, je suppose qu'elle était totalement fortuite.

Un point que j'ai par contre totalement abandonné, parce que j'était incapable de lui donner le moindre sens, et celui des sous-marins de contrebande. Le supplément Deadly Waters donne les caractéristiques des sous-marins utilisés par les cartels sud-américains (et qui existent dans la vraie vie) et parle de la possibilité d'entrer et sortir de Bogota avec l'un d'eux. La rivière qui passe à Bogota, le Rio Bogota, fait dans les endroits les plus larges, trente cinquante mètres de large, et une demi-douzaine de mètres de profondeur dans le meilleur des cas. Quand bien même vous songeriez à vous déplacer en sous-marin, pour rejoindre le Rio Magdalena (à peine plus profond) et ensuite le golfe du Mexique, il faudrait passer par les Salto del Tequendama, des chutes d'eau de 132 mètres de haut.